Le Bataillon Violette : combat du Pizou le 22 août 1944

Rédigé par Alain dans la rubrique Brigade RacCombatLieu de mémoire

Extrait de l'ouvrage La Brigade Rac par Capitaine Fred

Au soir du 21 août, la colonne allemande qui s’est enfuie de Périgueux, forte de trois à quatre mille hommes, vient coucher à Montpon.
Le monument le Pizou
Violette avec son bataillon, a quitté Périgueux le 21 au matin. Il arrive trop tard pour prendre part au combat de Saint‑Astier mais il décide de suivre dans l’espoir d’accrocher l’arrière‑garde allemande. Violette est un fonceur, il est en avant de tout son monde dans sa traction avant et il arrive à Montpon à peu près en même temps que les derniers éléments ennemis. La colonne le suit bien mais il réfléchit qu’un combat de nuit ne peut avoir lieu dans la ville. Ce serait une tuerie sans nom à laquelle serait mêlée la population. Sa décision est vite prise. Il passera de l’autre côté de Montpon et attaquera le lendemain en rase campagne quand l’Allemand voudra poursuivre sa route sur Bordeaux.

Il est 9 heures du soir quand tout le monde est de retour à Mussidan où on se ravitaille en vivres. On va passer par les petites routes, contourner Montpon et dresser l’embuscade du lendemain. A La Douches, un peu avant Le Pizou, les camions s’arrêtent, les hommes s’étendent à terre et s’endorment immédiatement tant ils sont fatigués. Il fait heureusement très beau.

Monument de Salagnac
Dans un silence impressionnant, les sections de combat sont rassemblées avant le jour et descendent, en colonne par un, vers la rivière l’Isle. Chacune va occuper l’emplacement qui lui a été désigné. Ces emplacements ont été tirés au sort entre les commandants de compagnies au cours de la nuit à la suite du conseil de guerre qui s’est tenu sous la présidence du chef de Bataillon. Une troupe qui marche au combat dans les conditions que nous venons de voir a un moral du tonnerre. Elle sait que la colonne allemande est dix fois plus nombreuse, qu’elle a de l’artillerie, des armes lourdes et qu’elle se battra avec l’énergie du désespoir. Mais le Bataillon Violette aura une confiance aveugle en son chef, avec lui il irait en enfer.

Le combat dure toute la matinée du 22 août. La 12e Compagnie va jusqu’au corps à corps. Elle perd 10 % de son effectif, dont le capitaine Selvez qui la commande.

Qu’importe! Le département de la Dordogne est maintenant complètement nettoyé. Violette remonte mais ne s’attarde pas à Périgueux où s’affichent de prétendus combattants F.F.I. « profiteurs de la gloire des autres ». Il retourne au camp de Veyssieras près de Miallet et de là, son bataillon regroupé, ira avec le reste du régiment Rac investir Angoulême.

Tué au cours de combat du Pizou le 22 aout 1944 :
  • Michel Acker ‘Alfred’ originaire d’Alsace, 2e caporal de la 12e compagnie du Bataillon Violette. 
  • Raymond Lair, 18 ans, originaire de Metz, 2e caporal de la 12e compagnie du Bataillon Violette. 
  • Paul Selvez, 49 ans, originaire de Douai, capitaine de la 12e compagnie du Bataillon Violette. 
  • René Cron, 29 ans, originaire de Strasbourg, sergent de la 12e compagnie du Bataillon Violette. 
  • Pierre Guérin, 26 ans, originaire de Suresnes, Seine. Intendant de la 12e compagnie du Bataillon Violette. 
  • André Blanchier, 18 ans, originaire de Saint-Jory-las-Bloux. 
  • René Martial, 19 ans, originaire de Corgnac-sur-L’Isle. 
  • Roger Tarrade, 18 ans, également de Corgnac. 
  • Joseph Talech, 29 ans, originaire d’Oran.                                                                           
Blessé
Jean Faye
  • Armond Genestie, 2e caporal Groupe Maquis. 
  • Jean Faye, Corps franc.
La commémoration du 22 août au Pizou est commémorée chaque année le premier samedi après le 22 août.

Pault Selvez

Quand le capitaine Paul Selvez, avant l’attaque de Périgueux, vient le 15 août 1944 dans la cour de la gare d’Agonac, où se trouve le P.C. de Violette, présenter sa compagnie qui descend de camions, il claque les talons et salue dans la forme la plus réglementaire qui soit. Selvez, classe 1915, quarante‑neuf ans en 1944, capitaine d’état‑major de réserve, cité à l’ordre de l’armée pendant la Première Guerre mondiale, se mettant au garde‑à‑vous devant un jeune de vingt‑quatre ans de moins que lui, à peine aspirant en 1940 mais commandant de son bataillon, c’est tout un symbole.

C’est bien le symbole de la discipline militaire librement consentie dans une armée de volontaires au patriotisme le plus ardent. Que les détracteurs des F. F. I. cherchant à ridiculiser leurs porteurs de galons méditent un peu sur l’attitude de Selvez magnifique soldat, mort au champ d’honneur huit jours plus tard, le 23 août 1944.

Originaire de Douai, en zone occupée, il renonce à rentrer chez lui après son retour de captivité en 1941 ; il ne tient pas à y retrouver les Allemands qui l’ont condamné à mort pour évasion en 1917 alors qu’il était requis civil. Il se fixe à Clairvivre où il a trouvé une place d’économe au sanatorium. Il arrive le 6 juin 1944 avec tous les jeunes de son entourage au camp Touzeau où va se constituer la 12ième Compagnie Rac. Étant donné son âge, il aurait pu rester bien tranquille, mais il se dit :
Les gosses ont besoin d’être encadrés et je suis capitaine. Conséquence : mon devoir est de les rejoindre.

Il rejoint Violette en juillet pour tenir le secteur de La Coquille. A la mi‑août, c’est la prise de Périgueux et la poursuite de la colonne allemande qui se replie sur Bordeaux. A l’aube du 22, c’est le sérieux accrochage du Pizou auquel participe la 12e Compagnie. Celle‑ci, à un moment donné, prise sous des feux de mortier, est obligée de se replier. Pendant ce mouvement, deux hommes sont restés étendus ; Selvez dit alors à un de ses sous‑officiers, Guérin, qui est à côté de lui : On va les chercher. C’est en les ramenant à l’abri qu’ils sont frappés à leur tour et tombent mortellement atteints.
A Clairvivre, enterrement du Capitaine Selvez, son adjoint le Sous-Lieutenant Rougemont prononce l'élobre funèbre